vendredi 3 octobre 2008

Le problème de l’égoïsme -- partie 6

Bâtir son ego spirituel

Bien que la solution soit simple, elle n'est pas facile d'application dans la vie de tous les jours. Ceux qui ont sincèrement essayé de vivre une vie d'amour et de sagesse se rendent compte que cela est extrêmement difficile dans un monde voué au matérialisme et à l'ignorance des choses spirituelles. Ceux qui essaient de faire un peu de méditation réalisent comment il est difficile d'avoir une paix et une harmonie intérieures et qui plus est de voir cette paix et cette harmonie autour d'eux.

Un autre obstacle sur le chemin du changement c'est que depuis longtemps on agit de façon égoïste. Il est très difficile de changer ses vieilles habitudes pour un autre mode de pensée et de sagesse non égoïste et spirituel.

Ces problèmes ne sont pas nouveaux. Ils ont toujours existé et c'est pour cela que dans la science des pratiques spirituelles, il y a des disciplines et des principes établis pour aider les gens sérieux à s'installer progressivement dans un mode de sagesse et d'amour. Ce n'est pas quelque chose qui s'obtient instantanément, c'est un cheminement. On doit progresser et tendre vers quelque chose qui semble toujours insaisissable et qui l'est par nature. L'amour n'est jamais suffisant. Plus on aime et plus on veut aimer. Il augmente toujours. Plus on est rempli d'amour, plus on pense ne pas en donner suffisamment. Et c'est souvent les plus spiritualistes qui se sentent les plus égoïstes.

Compte tenu de tous les obstacles, il est très facile de se perdre en chemin. C'est pour cela qu'il y a depuis toujours, dans les traditions spirituelles des points de repères. Ils sont la lumière sur notre chemin.

Le premier atout est le professeur, l'ami accompagnateur, le maître ou le guru, peu importe le nom qu'on lui donne. La profondeur de la relation établie avec cette personne sera déterminante. Ce guide nous aide sur le chemin et nous empêche de trébucher sur les grands obstacles. Prenons le capitaine d'un bateau, sans lui, il n'y a plus de sécurité, le bateau est en grande difficulté. Sans guide le chemin devient infiniment long. Un grand poète Soufi, Rumi, disait que sans un bon guide le parcours d'un chemin qui prend deux jours peut prendre plus de deux cents ans. Si l'on est perspicace on s'apercevra que l'on n'a pas deux cents ans dans une vie. Un maximum de cent tout au plus. Ce qui veut dire qu'on ne réussira pas dans cette vie sans un bon guide. Ce point est appuyé par toutes les traditions spirituelles.

Le deuxième atout est la discipline personnelle. Ce n'est pas le guide qui fait tout pour nous. C'est nous qui cheminons et faisons les efforts. L'effort implique toujours la discipline. On ne peut s'attendre à ériger notre nature spirituelle et dépasser notre nature égoïste en passant toute la soirée devant la télévision. C'est incompatible. On doit changer notre conscience, cela prend une discipline spirituelle adaptée. Si elle est trop difficile, on se décourage, on laisse tout tomber et on retourne à la télévision. Elle doit être ajustée selon la capacité de la personne. Il existe de nombreuses techniques de méditation, d'éveil spirituel et d'approfondissement de la nature spirituelle. Toutefois, le guide est indispensable pour comprendre la discipline et nous aider à cheminer à travers ces différentes disciplines et techniques.

Le troisième atout est la connaissance. Sans une connaissance éclairée et efficace on peut très longtemps tourner en rond ou prendre la mauvaise direction. Au lieu de se défaire de notre égoïsme, on peut l'augmenter très facilement. On s'imaginera être libre de l'égoïsme parce qu'on aura détruit l'emprise du corps matériel en devenant Dieu. Cette imagination ne fait qu'augmenter notre égoïsme et est une autre forme d'ignorance qui nous entraîne dans la mauvaise direction. Et, malheureusement, la grande majorité de ceux qui se croient des guides vont diriger les gens dans la mauvaise direction sans le savoir (par manque de connaissances). Souvent ces gens ont une connaissance très limitée de la science spirituelle, apprise ici et là, et ils se sont imaginés être de grands maîtres du jour au lendemain.

La connaissance est fondamentale. Non pas seulement pour celui qui chemine mais aussi pour le guide qui enseigne. Pour donner encore un exemple venant de la tradition chrétienne, les grands maîtres comme Thérèse D'Avila ou Jean Lacroix disaient que si l'on se choisit un guide il faut en choisir un sur mille et il faut qu'il soit le plus érudit possible. Il ne s'agit pas d'être un grand érudit sorti de l'université avec beaucoup de diplômes. Cela ne doit pas être que de la théorie accumulée depuis des années, le vrai guide vit ce qu'il enseigne. Il est lui-même à l'image de ce qu'il enseigne, cela fait partie de sa vie. Il doit y avoir harmonie et intégration entre ce qu'il dit et ce qu'il vit.

Dans les traditions de l'Inde, desquelles je suis issu, un guide doit avoir cheminé avec un maître (très érudit de connaissances spirituelles) pendant de très nombreuses années. Il doit recevoir l'approbation de ses propres maîtres pour pouvoir enseigner les connaissances acquises. C'est la raison pour laquelle je donne ces enseignements. J'ai eu une formation qui a duré plus de quinze ans auprès de maîtres très érudits et qui vivaient pleinement ce qu'ils enseignaient.

Plusieurs années auparavant j'ai rencontré d'autres maîtres qui étaient tous aussi érudits mais qui ne vivaient pas ce qu'ils enseignaient. De nombreuses années se sont écoulées avant que je trouve un maître véritable. Si mes maîtres ne m'avaient pas obligé d'enseigner la connaissance que j'ai reçue d'eux, je n'enseignerais tout simplement pas. Je préfèrerais cheminer seul sans donner d'enseignements. Mais c'est l'ordre que j'ai reçu et c'est ma façon d'être une partie au service du Tout (au service des autres). Mais ce n'est pas à moi de choisir ce que je désire. Ce serait encore un je matériel et égoïste pour moi-même.

La clef du succès réside dans le choix du maître, la connaissance et la discipline spirituelle. S'il nous manque un des trois, il est pratiquement impossible d'enrayer l'égoïsme.

Dans la pratique comment cela se passe-t-il? Avec un bon guide on obtient un programme de discipline spirituelle adapté à nos besoins et une connaissance adéquate. Avec une connaissance non égoïste, on peut faire des activités non égoïstes qui font partie de la discipline. La relation non égoïste avec le guide nous aide sur le chemin. En apprenant à vivre une relation non égoïste selon des actions non égoïstes et une connaissance non égoïste, peu à peu, on développe dans la vie de tous les jours une méditation constante, 24 heures sur 24, une vie non égoïste qui nous amène dans un autre mode de vie.

Ce mode de vie devenant de moins en moins égoïste et matériel nous fait entrer dans une conscience non égoïste et spirituelle. Au moment de la mort on va avoir une destination dans un corps, une vie ou un mode de vie qui va être non égoïste et spirituel. Et si l'on a obtenu la perfection dans cette vie même, on ne revient plus dans ce monde de matière rempli de souffrances et de gens égoïstes et matériels.

On veut vivre qu'avec des gens qui sont pleinement spirituels et non égoïstes, qui vivent dans l'amour et la sagesse. Mais il y a subtilité ici. Vouloir atteindre seulement un monde spirituel sans avoir la conscience non égoïste, c'est impossible. C'est encore un désir égoïste. Il faut cultiver dès maintenant un mode de vie non égoïste sans désirer une destination quelconque, cela ne dépend pas de nous. Ce qui nous arrive ne dépend pas que de nous de toute façon.


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