lundi 8 décembre 2008

Le problème de l’égoïsme -- partie 5

Identification au vide

Avant de poursuive, j'aimerais parler d'un autre grand problème d'égoïsme, celui de s'identifier au vide, au néant. Ce problème d'identification au vide est la solution des nihilistes et des impersonnalistes. Solution très à la mode dans l'hindouisme et dans le bouddhisme.

Donc nous ne sommes pas Dieu, ni le Tout ni de la matière. Que sommes-nous alors? Que du néant qui retournera au néant? N'est-ce pas que cette solution peut paraître logique et séduisante.

Sans tomber dans un extrême matériel ni dans celui de se prendre pour Dieu, on se situe au milieu, on est ni l'un ni l'autre. Malheureusement cet entre-deux n'est pas ce qu'on pourrait croire, c'est bel et bien un extrême. Lorsqu'on dit qu'il n'y a rien, on est encore dans un extrême.

Il est pourtant facile de comprendre que le vide n'existe que dans l'imagination fertile du nihiliste. Il n'y a jamais eu de néant et il n'y en aura jamais. Rien n'est vide dans cet univers. Même l'univers matériel est rempli de matières. Il y a partout des éléments visibles et invisibles. L'air autour de nous qui semble vide est rempli de molécules et de particules. Même les lieux les plus déserts sont remplis de rayonnements, de particules et de vibrations. L'espace lui-même n'est pas vacuité. Aucun vide non plus ni à l'extérieur ni à l'intérieur de nous. Qu'on regarde à l'intérieur de nous, il y a des pensées, des sentiments, il y a quelque chose. Ce quelque chose à l'intérieur ou à l'extérieur est insaisissable, inconcevable, difficile à décrire mais il y a quelque chose.

Cet attrait pour le vide existe dans toutes les traditions car il est très séduisant de passer du Tout au vide. Mais essayer de décrire le nirvana comme un vide d'où l'on vient, d'où l'on naît est fort problématique. On ne peut décrire comment ce qui existe avant nous vient du néant. C'est impossible. Tout comme dire que la Réalité Ultime est néant.

C'est une des raisons pour lesquelles on ne voit plus de bouddhistes en Inde depuis plus de mille ans. Le bouddhisme est né en Inde il y a environ deux mille cinq cents ans et depuis plus de mille ans il est complètement éradiqué. Il n'y a plus de bouddhistes du tout. La principale raison en est que les philosophes bouddhistes ont voulu soutenir que la Réalité Ultime est du néant. Tout étant temporaire, rien n'existe véritablement ou longtemps. Sans entrer dans les thèmes très techniques de leur conception du vide, les philosophes bouddhistes les plus subtils reconnaissent que ce n'est pas seulement du néant et ils utilisent un terme qui veut dire «dénué de». «Il y a peut-être quelque chose ou peut-être pas», ils restent agnostiques sur le sujet.

En résumé la position totalement nihiliste du vide n'est soutenue ni par les plus grands philosophes bouddhistes ni par ceux de l'Inde. Partout sur la planète la théorie du nihiliste fut combattue. Le philosophe grecque Parménide disait : «ce qui existe, existe toujours, ce qui n'est pas, n'existe jamais. Le vide n'existe pas et n'existera jamais».

Nous ne sommes ni un vide, ni le Tout, ni une simple machine matérielle. On est bien plus que cela, on est une partie du Tout. On est une partie spirituelle d'un Tout spirituel, momentanément dans un corps matériel, et on peut changer de corps comme on change de vêtement ou comme on change de véhicule. On obtient différentes destinations selon notre niveau de conscience. Pour simplifier le tout, plus notre conscience sera non égoïste, plus notre destination sera supérieure et notre mode de vie en accord avec l'amour et la sagesse.

amour et sagesse

Étant des âmes spirituelles faites pour vivre dans une pleine sagesse et un plein amour, rien d'autre ne pourra nous satisfaire. Et pour parvenir à ce véritable ego spirituel (cette véritable vie pour laquelle nous sommes faits) on doit commencer maintenant à vivre cette vie d'amour et de sagesse. Et si nous sommes assez perspicaces et analytiques, nous comprendrons que cet amour et cette sagesse sont déjà, en eux-mêmes, la solution, le médicament et l'opposé de l'égoïsme vu précédemment.

L'opposé de l'égoïsme, par lequel on ramène les choses à soi, est l'amour, par lequel on ramène les choses aux autres. On n'agit pas pour soi mais pour les autres. Dans cet amour on n'agit pas simplement pour le soi matériel de l'ego imaginé, mais aussi par amour de soi, du véritable soi, de la véritable partie spirituelle du Tout que l'on est.

Cet amour de soi, de la véritable partie du Tout que l'on est, n'est plus un amour égoïste mais un amour véritable rempli de sagesse. De la même façon la sagesse est l'antidote à l'ignorance, à l'illusion et à l'imagination d'être ce que l'on n'est pas. Par la sagesse on découvre ce que l'on est véritablement « une partie du Tout » et les fausses idées de soi s'évanouissent.

C'est intéressant de constater qu'en développant davantage d'amour pour la sagesse, d'amour pour le véritable soi, d'amour pour le véritable Tout et d'amour pour les autres parties du Tout, on peut ainsi vivre en harmonie avec tout ce qui nous entoure. On peut vivre en harmonie avec nous-mêmes et avec le Tout, simplement grâce à cette sagesse et à cet amour.

N'est-ce pas quelque chose de simple, de sublime et de merveilleux. Qu'un problème aussi difficile puisse être réglé de façon aussi simple. Simplement en cultivant une vie d'amour et de sagesse véritable, on se libère du problème de l'égoïsme (possessif). La solution est aussi universelle, comprendre qu'on est une partie du Tout et agir par amour pour ce Tout et en connaissance de ce Tout. Comprendre aussi qui nous sommes par rapport à ce Tout, par rapport à tout le reste du monde, à tout ce qui existe. C'est une démarche que chacun peut faire par lui-même, de façon efficace, en essayant d'être le moins égoïste possible tout en cultivant le plus de sagesse en cette vie.



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